lundi, août 20, 2007

Le léger et le lourd.

C’est parce que nous sommes toujours déjà et encore des primitifs que nous projetons d’abord nos perceptions intérieures pour construire une image du monde. Que nous sommes encore et toujours habités par la volonté active et créatrice qui le dispute sans cesse aussi à la volonté réactive encore que dans un rapport inversé, quand ce qui fait signe à l’intérieur n’est qu’une trace que l’oubli n’a pas encore effacé ce qui rend compliqué parfois la transposition qui doit nous mener vers des objets extérieurs parce que nous sommes tellement narcissiques ! Primaires ou secondaires peu importe. La peau n’est plus cette coupure mais je ne suis pas pour autant transparent et tous les archétypes ne suffiront jamais.

L’autre jour je suis sorti de chez pour aller acheter des clopes. Il faisait beau temps et dans l’escalier je me suis surpris à penser, tiens, c’est quand même beau la vie ! Je me sentais tout à cours parfaitement libre et léger, presque assez pour me mettre à danser. Et j’ai compris ce que je savais déjà depuis longtemps mais d’une autre façon, que nous ne sommes libres qu’à la condition que la vie n’ait aucun sens, parce que tous les sens que nous fournit la culture sont autant de limites et d’obstacles à la vie. Mais le beau temps ? Le beau ? Là, dans l’escalier ! Est-ce que le beau serait d’emblée comme un sens que nous sommes sommés de poursuivre depuis qu’on l’a associé au bien comme le fait que je me sentais alors bien ? Et se sentir bien, ne serait-ce que quelques secondes serait-ce accéder au statut de surhomme déjà baisé par l’esclave réactif et triomphant ? Bon, je crois bien que tout cela n’était qu’entourloupette, ruse de la raison où qui sait quoi « encore ». Parce que ce genre de sentiment ne dure en somme que le temps d’un orgasme. Débarrassés de nos peurs quand « bien » même on ne fait que prévoir le pire justement dans une totale indifférence, cette légèreté bientôt alourdie par la mémoire, ce sac de vipères culturelles qui vous sifflent à l’oreille le terme d’ « ataraxie ».

Le poids des mots.

lundi, août 13, 2007

Sale temps.

Comme d’habitude – quelle rengaine ! – ces temps, j’en fous pas une. Alors pour me bouger, m’articuler, mercredi sur le coup de trois heures tandis qu’un ciel d’automne pas un ciel d’a/out, ni d’aou et encore moins d’out mais d’ou – c’est ainsi parait-il que nous devons prononcer le mois d’Août – sur le coup de trois heures et de tête j’ai décidé de prendre un train pour me rendre au festival des 6 pompes à la Chaux-de-Fonds. J’étais fière. Comme tout nous y incite je bougeais enfin mon cul après avoir débranché tout mon attirail électrique – on ne sait jamais, avec les orages. Il y a quelques années j’avais décidé de participer à un concours lancé par l’Académie de Dijon, pour marquer le coup et se souvenir de Rousseau qui avait empoché le premier prix grâce à son texte : Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes. A l’époque j’avais un traitement de texte qui m’avait coûté plus que mon Pc aujourd’hui. La veille du jour dernier délai pour expédier mon texte planqué dans les entrailles de ma machine je regardais une émission sur Arte consacrée aux catastrophes. Il y avait un superbe orage avec des coups de tonnerre et des fulgurances qui ravissaient mes sens. Mais le lendemain matin je devais imprimer emballer et expédier mes trente pages. Hélas trois fois hélas elles avaient disparu. Pas moyen de les retrouver. J’étais anéanti. Aussitôt j’ai écrit à l’Académie pour expliquer mon malheur et par retour du courrier j’ai reçu une lettre qui disait substantiellement que j’avais de la chance dans mon malheur vu que pour quelque cause dont je ne me souviens pas, la date limite était reportée à plusieurs semaines. Tout ça à cause d’un orage. Evidemment je n’ai pas eu le courage, l’énergie ou quoi que ce soit d’autre pour recommencer.

Donc après avoir tout débranché et moi-même de toutes préoccupations indigentes j’ai pris le train – c’est le train qui m’a pris, en route sous un ciel de plomb, bouché, débile et très triste vers la Tchaux. A mi chemin il tombait des hallebardes. C’était si déprimant que j’ai failli renoncer et faire demi tour. Mais j’avais alerté un pote qui m’attendait. Dans une ville très déprimante avec ses longues rues toutes droites et quadrillée à l’américaine. Une ville qui était passée de la richesse à une pauvreté qui en faisait chialer le ciel. Et moins de 10 degrés de température ! Je grelottais, les muscles bandés à m’en faire mal sous ma veste coloniale et mon petit parapluie à la con. J’ai tout de suite été trempé jusqu’aux genoux sans parler de mes pompes qui pompaient la flotte. L’horlogerie m’avais très vite rapproché de Rousseau mais c’était il y a longtemps lorsque le romantisme avait un caractère révolutionnaire qui affectait davantage les pulsions et la superstructure que l’infrastructure. Parce que, comme le disait Kant en gros, on voit le monde comme on est intimement affecté. Là, je le voyais mal, triste et déprimant. Pourtant, sous le déluge, parmi les buvettes, ils étaient au moins deux à faire leur possible pour chasser les démons du ciel. Une jeune fille toute mince qui se battait avec un accordéon et son pote qui tapait le rythme sur une vieille enceinte. On buvait des vins chaux à fond. Puis on s’est réfugiés dans un bistrot pour se saouler un peu la gueule histoire de noyer notre chagrin qui, hélas, savait nager. Il y a parfois des pulsions qui vous enduisent avec de l’erreur ! Comme on m’avait conseillé de ne pas voir ma mère dans son cercueil pour garder d’elle un plus beau souvenir, jamais ne n’aurais dû venir à la Tchaux par un temps pareil. Je suis reparti le lendemain tout aussi triste en trempé.

mercredi, août 01, 2007

Pro/jet

Bon. C’est juste une façon de commencer qui marque d’emblée l’inconfort d’une situation. Celle de celui qui prétend commencer quelque chose d’autre, ce quelque chose d’indéfini qui interpelle toujours celui qui veut la dire. Je ne veux surtout pas ici non plus rechercher l’essence de cette chose, essence qui n’est au font que la valeur que je lui attribue, moi-même personnellement. Donc, est-ce que j’attribue de la valeur à disons au sens d’un symptôme de tous les mots d’un discours qui prétend en avoir un ? Chaque mot étant symptomatique de quelque chose qui le dépasse autant , me casser tout de suite la tête contre le bord de ma table. On pourrait dire qu’il s’agit – mais il pourrait tout aussi bien s’agir d’une autre chose – de ma volonté. Et comme la volonté ne veut rien la cause de celle-ci est entendue. Car autant demander au bois de l’arc tendu ce qu’il veut ou à la corde ou encore à la flèche. Mais il se trouve que je me pique de. Mais de quoi ? On pourrait dire que je suis piqué et même piqué au vif, donc là ou cela fait le plus mal par l’image du monde que je projette, que mes flèches agissent comme des boumerangs. Ne sommes-nous pas ici dans l’éternel retour du même ? Mais rien que de le supposer j’en ai la nausée. Car supposer que le monde n’est que ce que je lui prête, que cette pure invention – pure hein ! Quelle misère ! – c’est pour le coup que tout discours ne relèverait en somme que de la psychiatrie. Mais c’est bien cette évidence qui me met dans l’embarras. Pourquoi inventer toujours un monde misérable si ne n’est pas pour le rejeter ? Si ce n’est pas d’abord dans le jet que le symptôme du rejet comme sentiment de dégoût, ce manque d’air qui vous saisi lorsque vous passez près d’une fosse à purin ou que l’on entre dans une chiotte dégueulasse. Je vois bien que la nausée se pointe ici en catimini mais le fait que l’odeur des mandarines me fout la nausée bien plus radicalement que celle du purin que, lorsque j’étais enfant, tandis que nous faisions dans la campagne la promenade dominicale forcée, dès que des champs montait cette puanteur du lisier on me disait de respirer profondément, que c’est bon pour les poumons. Alors quoi ? Qu’est-ce qui pourrait y avoir de bon, en somme, dans ce « monde de merde » dans lequel sans cesse je me situe ? Si ce n’est encore et toujours comme une injonction qui me vient du passé comme elles venaient de l’extérieur chez les Grecs par exemple. Revenons donc aux mandarines et à cette odeur qui me fout la nausée. J’étais tout gosse à l’hôpital parce qu’en rentrant de l’école en courant sur la route je me suis jeté sur un mec à vélo et me suis fait casser la cheville. Plâtré jusqu’au genou et dans la merde jusqu’au cou parce qu’un enfant qui ne peut plus courir c’est plus rien. Aussi, il fallait bien se dépasser autrement. Et pour un gosse rien de tel qu’un concours même immobile dans un lit tout blanc et tout frustrant – c’est pourquoi je pense que tous les concours sont infantiles – que les Grecs étaient des enfants dans le berceau de notre civilisation et que tous les berceaux commencent toujours par sentir la merde. Bref, vu que les fruits dit-on c’est sain santé mais presque divin – voyez les pommes ! Il s’était agi de voir qui en mangerait le plus vu que nous disposions de tonnes de mandarines. J’ai oublié qui l’a emporté, moi ou un autre, toujours est-il que j’en récolté une formidable indigestion et que depuis lors… Tout est une question de quantité ? Ne dit-on pas trop de bien nuit ? Ou bien dit-on, trop de biens nuit ? Ou bien, trop nuit ? Mais dit-on jamais trop de mal nuit ? Jamais. Donc, un « monde de merde » ne saurait nuire à celui qui l’invente quand bien même il y aurait vraiment trop de « merde ». Cela ne pourrait être que bon, si ce n’est pour ses poumons, disons pour sa tête puisque tout vient de là. Mais si le monde n’est qu’un symptôme lié à un souvenir d’enfance nous sommes plantés dans le conflit et la confusion entre le passé et le présent, l’immobilité et le mouvement du monde, mouvement qui n’est autre que celui de la pensée même si elle tourne sur elle. Et comment pourrait-elle accomplir un autre mouvement ? Comment la pensée pourrait-elle échapper à son mouvement sans cesser d’être la pensée ? C’est peut-être çA la « merde » La pensée n’est pas un roman avec un début un milieu et une fin. C’est le monde sans fin. La P est aussi un M qui se P le L de la R. Ou disons, la Pensée est un Mouvement qui se Paie le Lux de la Révolution. Mais la pensée n’est pas l’être, c’est la chair. Et sous la chair c’est la puanteur. En ce sens la pensée devrait nous protéger de la puanteur. Inutile ici de faire un dessin. Par la force de l’habitude on retombe comme qui dirait dans le berceau du verbe qui se fait chair. Des verbes, des noms et des adjectifs, des sujets, des compléments etc., tout le matériel est là pour faire un monde qui tourne sur lui-même. Le problème c’est que tout ce matériel dont la matière reste à prouver ne saurait servir d’abris à qui ou à quoi que ce soit… symptomatologie. Logomachie. Enregistrement. Traces. Sillons. Béances. Blessures. Comme le ventilateur de mon ordinateur qui se met en route. Programme. Programmatique.


« la méditation de l’objet par le sujet prend toujours la forme du projet ». Bachelard.




CECI EST BIEN UNE PIPE.


Continuation de se qui se projetait du passé en adéquation avec le futur. Comme tout processus mécanique il y a ici comme une augmentation de l’entropie, une perte d’énergie, parce que toute processus cognitif et donc la pensée se frotte à quelque chose qui lui est presque étranger bien que cette étrangeté puisse jaillir sous la forme du witz, du lapsus ou de la métaphore. Je suis par conséquent dans l’involontaire, l’accidentel et même si je suis un rien parano, je ne le serai jamais assez pour prétendre maîtriser une situation que j’ai choisie parce que rien de se passe jamais comme on l’avait imaginé. Aussi, je pourrais sans scrupule et sans l’ombre de quoi que ce soit exhiber mille grands esprits qui continuent de nous fasciner tout de même par leurs savoirs et leur rigueur et leurs méthode géniales qui se sont tout de même usés la santé pour des clopinettes. Trop bien nuit. Mais d’où peut bien venir la lumière qui me fait de l’ombre, qui projette cette ombre dans laquelle j’avance ? Car je suis bien certain qu’en ce lieu nul ne saurait y voir une sorte de clarté émanent d’une logique quasi mathématique, la possibilité d’une formule.

Une usine électrique.

Dans un de mes cauchemars d’enfant j’ai fait exploser l’usine électrique qui se trouvait à trois cent mètres de la maison.

Les lumières de ma chambre, de tout notre appartement ont vacillé, baissant et augmentant d’intensité puis ce sont éteint tandis que les explosions secouaient la maison.

Une nuit si totale que même les chats ne pouvaient être gris.

La nuit nous jette dans un monde des plus incertains qui fait sous/venir des formes sans substance comme des mots d’une langue étrangère. Le corps lui-même perd ses limites. Et tout devient possible surtout le pire et le pire du pire se montre toujours dans une faible lumière qui fait scandale. Je pense au scandale du paradoxe mais je n’ai rien à dire à ce sujet vu que c’était ma mère. Oh la tête ! Oh le regard ! Si lointaine et si proche et si menaçante ! Encore aujourd’hui elle me fout les boules cette mère-là. J’ai cru qu’elle savait que c’était moi qui avait fait péter l’usine et tous les alentours et jeté toute la famille dans ces ténèbres épais comme sa chevelure.

Du reste, le souvenir de ce rêve n’est qu’un écran. En lui sont tapis d’autres monstres sans doute mille fois plus effrayants.